On the edge of the war zone – chapitre 37
CHAPITRE XXXVII
19 mars 1917
Quelle semaine agitée nous avons eue. Mais ce fut une agitation heureuse. C’est comme si je n’avais jamais ressenti de douleur ou de chagrin, et que le temps et l’âge n’existaient pas. Avec l’avance anglaise, la révolution russe, et les zeppelins dégringolant des cieux, chaque jour a juste été un peu plus palpitant que le jour précédent. Je me demande concernant « Willie », comme nous avions l’habitude de l’appeler à l’époque où nous ne le prenions pas au sérieux, ce qu’il ressent au sujet de son dernier grand succès, la conversion démocratique, ou, je suppose, je devrais dire plus exactement, la conversion de toute la Russie à la démocratie ? Cela doit faire une drôle d’impression de s’être efforcé d’accomplir une chose pour aboutir exactement à l’inverse. Hier, c’était dimanche, jour qui clôturait le week-end agité, et troisième jour de beau temps de la semaine, plein de soleil, d’air clair, et de ciel bleu. |
Le matin les soldats commencèrent à venir chez moi pour rapporter les livres, en emprunter d’autres, et parler un peu de politique. La destruction du zeppelin à Compiègne, et la nouvelle que les Anglais étaient à Bapaume, étaient un peu éclipsées par la chute malvenue de Briand.
Les garçons semblaient tous en pleine forme, et ils avaient tous de nouveaux uniformes, même de nouveaux képis et de nouvelles bottes. Le Canadien, qui vient généralement seul, accompagnait trois de ses camarades qu’il me présenta, et comme je montrai le chemin de la bibliothèque, je remarquai, « Mais comme nous sommes chics aujourd’hui ». Ils rirent tous et expliquèrent que c’était dimanche et qu’ils étaient habillés pour une invitation officielle. Si certains d’eux devinaient que le nouvel équipement signifiait quelque chose ils ne le montraient pas. J’imagine qu’ils ne suspectaient rien de plus que moi, car ils ont tous descendu la colline avec un livre sous le bras, alors que quatre heures plus tard ils se préparaient à avancer. Il était exactement quatre heures de l’après-midi quand la nouvelle arriva que les Français avaient franchi la ligne à Soissons, juste en face de nous, et que Noyons avait été reprise, que la cavalerie était à cheval, (cela signifie que le 23e régiment de dragons avançait dans la poursuite), et seulement un quart d’heure après nous avons appris que l’ordre du rassemblement général était sonné, et le 118e appelé sac au dos à six heures trente. Il y eut pendant une demi-heure un rush sur la colline, garçons me rapportant mes livres, venant pour me serrer la main, m’offrir de petits souvenirs, et me dire que les camions arrivaient, ce qui voulait dire que le 118e était en train d’entrer directement en action de nouveau. Quand un régiment démarre dans une précipitation telle qu’il doit prendre une ligne directe, et ne peut pas emprunter le chemin de fer, les garçons savent ce que cela veut dire. Je sais que vous me demanderez comment ils ont pris l’ordre. Aussi je vous le dis sans attendre. J’ai vu quelques visages pâles, mais cela ne dura qu’un moment. Un groupe se tenait devant moi dans la bibliothèque. J’avais juste reçu du front par la poste le parachute de soie d’une fusée volante sur lequel était écrit : « A Mademoiselle Mildred Aldrich, ramassé sur le champ de bataille à 20 mètres des lignes boches. Souvenir de la patrouille du 22 février 1917 », et la signature de l’Aspirant, et c’est seulement ainsi que j’appris qu’il avait probablement pris part à une mission dangereuse. En fait de mission dangereuse, c’était la première fois que j’en voyais une d’aussi près, durant les exercices de nuit au sujet desquels je vous écris, et un des garçons expliquait son action et sa stratégie, et tout le monde sauf moi riait de la démonstration graphique. Je ne sais pas pourquoi je ne riais pas. D’habitude je ris plus que personne d’autre. Je pense quelquefois que j’ai ri plus pendant les deux dernières années que pendant tout le reste de ma vie. Le démonstrateur me regarda, et me demanda pourquoi j’étais si grave. Je répondis que je ne savais pas, peut-être parce que j’étais surprise qu’ils soient si gais. Il comprit aussitôt. Il dit très simplement : « Bien, Chère Madame, nous devons être gais. Que ferions-nous autrement ? Si nous pensions trop souvent aux camarades qui sont partis. Si nous nous rappelions trop souvent que nous risquons notre peau tous les jours, l’Armée serait démoralisée. Je pense rarement à ces choses, sauf juste après une attaque. Alors je respire profondément, regarde le ciel, et je ris comme je dis à mon âme : « Bien, ce n’était pas cette fois-là, peut-être que cela n’arrivera jamais. La vie est chère à chacun de nous, à sa propre façon, et selon ses propres raisons. Heureusement elle nous est moins chère à nous tous que ne l’est la France ou l’honneur ». Je me tournais et regardais par la fenêtre un moment. Je ne pouvais pas me maîtriser, et la minute suivante, ils me serraient tous la main, et descendaient la route pour se préparer. Les camions chargés commencèrent à circuler juste après la tombée de la nuit. Personne ne connaît la destination. Mais d’après la direction, ils allaient vers Soissons. Ils ont circulé toute la nuit, et la première chose que j’ai entendue ce matin était le clairon en direction de Quincy, et les nouvelles arrivèrent à l’heure du petit-déjeuner que le 65e régiment, le dernier des grands régiments combattants à entrer en action à Verdun, et celui qui y est resté le dernier, était en marche. L’employée du boucher apporta la nouvelle, et « Oh Madame », ajouta-t-elle : « Les Américains sont avec eux ». « Les quoi ? » m’exclamai-je. « Un grand corps d’ambulances, un certain nombre de voitures-ambulances, et ils ont mis leurs tentes là-haut à Quincy ». Vous pouvez imaginer combien j’étais émue. J’envoyai tout de suite quelqu’un à Quincy pour savoir si c’était vrai, et la nouvelle revint que le corps sanitaire Capitaine Norton, quarante hommes qui ont été avec cette même division, le 31e corps, pendant de longs mois, était arrivé de Verdun avec le 65e régiment, et devait le suivre quand il avancerait de nouveau. Cette fois le cantonnement ne va pas à Huiry, seulement au pied de la colline à Voisins. Naturellement je n’ai pas encore vu nos garçons, mais je les verrai probablement dans quelques jours. |
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