Je traite en fait un sujet de proximité et ce, pour plusieurs raisons. Le 276 ème RI était est un régiment de réserve qui fut constitué, à la mobilisation, par le dédoublement du régiment d’active, le 76 Régiment d’Infanterie : 2 & 76 = 276.
C’est grâce au "2 de tête" que l’on pouvait reconnaître un régiment de réserve, constitué par des soldats mobilisés. Le 76ème régiment d’infanterie stationnait à l’époque à Coulommiers et à Orléans. Nous y voici. De part sa localisation le 276ème était en fait servi en grande majorité par des jeunes briards et de parisiens. Henri Bury était né à Mitry-Mory et c’est dans ce bourg qu’il vivait toujours quand survînt la mobilisation. C’est pour cela que le caporal Bury – grade acquis quelques années plus tôt pendant son service militaire au 76èmr RI – a quitté Mitry pour rejoindre Coulommiers en train, en passant par Paris.
Le 276ème RI était donc une sorte de régiment de Brie et c’est sur cette terre qu’il allait s’illustrer tragiquement et victorieusement (sur le plan militaire, s’entend) un mois plus tard, au cours de la bataille de la Marne et de l’Ourcq.
Par ailleurs, l’évocation du 76ème RI éveille en moi des souvenirs plus personnels, ceux de mon propre service militaire, car c’est au sein de ce régiment que j’ai crapahuté pendant quelques mois en 1983. Eh oui, les p’tits gars, je suis un des derniers briards à avoir servi ce régiment comme aspirant. Il fut en effet définitivement dissout quelques années après mon retour à la vie civile, victime d’une grande réorganisation de l’armée de terre, prémice de la suppression du fameux service national obligatoire.
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ma "pucelle" que je conserve en souvenir |
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Au moment de la mobilisation, selon son âge, chaque homme doit s’acquitter de ses obligations militaires, dans des armées qui assurent des misisions plus ou moins périlleuses :
– l’armée d’active (combat au front) : Sont mobilisés dès le début du conflit les régiments d’active : numérotés de 1 à 176. Elle est composée des hommes âgés de 21 à 23 ans. La durée du service est de 3 ans. – l’armée de réserve (combat au front) : Sont mobilisés dès le début du conflit les régiments de réserve : numérotés de 201 à 421. Elle est composée des hommes âgés de 24 à 33 ans. – l’armée territoriale (celle des "pépères", missions à l’arrière : fonctions de police, de garde de points sensibles, … ): Sont mobilisés tout au long du conflit les régiments de la territoriale et de la réserve territoriale. Elle est composée des hommes âgés de 34 à 39 ans – réserve de l’armée territoriale : Elle est composée des hommes âgés de 40 à 45 ans. Srce : d’après Wikipedia
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La première page du cahier du grand père Bury. Une belle écriture, digne de l’école républicaine qui avait d’ailleurs bien préparé les esprits à la confrontation. Evocation de l’arrivée aux quartiers de Coulommiers, avec passage par les hauteurs du Theil. Le transfert vers le front en Lorraine s’effectuera en wagons à bestiaux. |
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Venons-en au site consacré au poilu.
Le site s’articule au tour de la vie du caporal, en s’appuyant sur un journal qu’il a tenu tout au long de l’année 1914. Le Grand Père avait 29 ans tout juste au début du conflit. Heureusement pour lui, il vêcut jusqu’à l’âge de 86 ans. Cette bonne nouvelle signifie donc qu’il s’en était sorti, après plus de 4 années passées la plupart du temps au front. Un peu de convalescence toutefois, suite à trois blessures dont deux sévères : une balle dans le cou d’abord, puis plus tard des éclats d’obus dans le ventre, dont plusieurs ne furent jamais extraits.
Le poilu, avec le grade d’adjudant fut démobilisé en 1919 et revint donc chez lui avec des souvenirs que l’on imagine, douloureux, des morceaux de métal dans l’abdomen et plusieurs médailles et autres citations comme « récompense ». "Cité deux fois, à l’ordre du Régiment et à l’ordre de la Division. Il est décoré de la Croix de Guerre et de la Médaille Militaire"
Un chanceux au bout du compte ?
Dès l’incorporation terminée à Coulommiers, début aout 14, le 276ème fut déplacé sur la frontière de l’est, en Lorraine (la frontière était plus à l’ouest au début du conflit). Les premières semaines de la guerre virent une poussée fracassante des allemands qui début septembre pouvaient presque apercevoir Paris.
Le 276 et ses briards avaient battu en retraite et furent repositionnés au nord de la Marne à l’ouest de Meaux, à quelques kilomètres de Mitry (retour à la case départ pour le caporal !) ! Le régiment est rattaché à la VIème armée du Général "Maunoury" ou armée de Paris, voulue par le commandement en chef avec comme base des hommes de la Brie et de Paris. Le commandement pensait ainsi que ces hommes défendrait encore avec plus d’ardeur leurs terres et villages (précision de l’auteur).
C’est donc dans ce secteur que se déroulèrent des combats acharnés dans les premiers jours de septembre 14, à hauteur de Monthyon notamment.
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Le caporal avait un lieutenant pour chef de section, qu’il appréciait. Il l’appelait Péguie, c’est du moins comme cela qu’il orthographiait son nom dans son journal. L’extrait ci-dessus décrit l’assaut au cours duquel Charles Péguy fut tué le 5 septembre près de Villeroy. A ce moment là, les soldats de la section ignoraient qui était ce Peguie et ce n’est que quelques jours après sa mort qu’on leur expliqua que Charles Péguy était un poète jouissant d’une certaine reconnaissance auprès d’un public averti. Pour les soldats c’était leur lieutenant, tout simplement.
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Je vais m’arrêter là et vous laisser lire la suite des aventures du poilu Henri Bury, sur le site créé par son petit fils. Tout cela commence presque comme un roman. C’était juste la réalité. Il est dommage que la suite du journal ait été perdue. Elle s’arrête juste avant la Saint Sylvestre 14. Hasard ? Nécessité ? Il est très possible que les pages qui suivaient décrivaient une scène de "fraternisation" à l’occasion de la Saint Sylvestre, car Daniel indique que son Grand Père lui avait dit avoir serré la main d’allemands lors d’une telle occasion. Au-delà de la vie du Grand Père le site propose de nombreux chapitres documentaires, sur la guerre en général, sur Charles Peguy, et aussi sur le 276 régiment d’infanterie. D’autres chapitres contiennent une foule de documents amusants et intéressants, sur la publicité pendant la guerre par exemple. Tout un manuel de geographie de cours moyen est également scanné. L’image d’a côté contient un petit extrait à propos du service militaire, de la bravoure des soldats. Vous y trouverez beaucoup d’autres informations, et même un quizz, le tout avec un fond musical bien adapté. Je vous laisse le soin de tourner les pages de ce site, et d’y laisser vos impressions, il y aussi un livre d’or .
josé navarre
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La confiance était de mise comme l’indique cet extrait d’un manuel scolaire de la fin du XIXème siècle |
Un chocolat qui excite le courage, malgrè les plus dures épreuves
Les substituts de repas étaient déjà à la mode dans les tranchées. |
cartes postales du 76ème Régiment d’infanterie : collection jna
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La feuille de coca en amérique du Sud et la noix de cola en Afrique contiennent des substances biochimiques qui permettent de lutter contre la fatigue et de reculer les limites naturelles dans ce domaine. Une forme de dopage poour les combattants ?
Donc le coca cola serait un dopant, donc une espèce de drogue, un produit dangereux en vente libre ? J’ai toujours entendu dire que c’était une boisson excitante. Serait-ce plus dangereux que le café ou le thé ?
il y avait aussi « le gros qui tache » le pinard.
Un précieux témoignage que ce site. Merci à jna de nous l’avoir fait découvrir avec maintes détails.
Lire ces mots, ceux d’un acteur de ces pages d’histoire, de la grande histoire avec tant de drames et de souffrances, marque un moment d’émotion intense.
L’épisode de la fraternité avec les soldats allemands à la Saint Sylvestre me rappelle une histoire que me racontait mon grand-père. C’était sur le front de l’est où il était alors. Une compagnie de son régiment avait l’habitude de se retrouver les soir et de faire la fête avec des allemands, et donc de venir sans arme. Un jour l’état-major d’en face eut l’idée de changer de régiment. Ces camarades ont été à leur rencontre comme d’habitude sans savoir que ce n’était plus les mêmes. Ils se sont tous fait massacrer …
tant d’homme on donné de leurs vie pour donner un sens au mot liberté ,qui est trop souvent bafoué 🙁
Sans aucun esprit de fraternisation, il arrivait que les français et les allemands se rencontrent lorsqu’un point d’eau se trouvait entre les tranchées allemandes et françaises. D’un commun accord, à une heure fixe, les tirs cessaient et quelques soldats désignés sortaient des tranchées pour se retrouver autour d’un puits pour y puiser de l’eau. Il n’y avait alors ni animosité, ni fraternité entre ces combatants ennemis qui en profitaient pour se confier des lettres, qui donnaient des nouvelles de ceux qui avaient de la famille de l’autre côté du front. On échangeait aussi quelques produits comme le chocolat, le tabac etc..Ce n’était pas du commerce mais du troc.
Chacun retournait ensuite dans sa tranchée, avec la provision d’eau pour 24 heures, et la tréve une fois terminée, les tirs et les combats reprenaient.
tu fais bien de rappeler ce souvenir à une époque (la nôtre) ou les jeunes ont tendance à tourner en dérision tout ce qu’il s’est passé avant leur naissance;tu as eu bien de la chance d’avoir connu ton grand père; le mien a été tué en 1916 à 22 ans dans la meuse, ma mère avait 1 an.
Ma mère n’avait jamais trouvé l’emplacement de sa tombe; c’est grâce à internet que il y a quelques années,je l’ai retrouvé..dans un cimetière militaire contigue à un cimetière allemand à Rembercourt aux pots.
jolie boulot merci
Samedi soir, à l’occasion de la nuit des musées, nous sommes allés visiter le museé de la Grande Guerre à Meaux.
Ce fut une belle soirée pour le musée, car en y arrivant vers 21H15, il était très difficile de trouver une place de parking, la capacité de ce dernier étant insuffisante par rapport au nombre de visiteurs ce soir là.
C’est vraiment un bel endroit, où les choses n’ont été faites à moitié.
Je vous conseille donc cette visite qui offre un bon panorama de la guerre de 14-18, abordée par thèmes. La grande salle présente une belle collection de véhicules militaires d’époque, de canons, d’avions… et de nombreux soldats presque vivants… hier soir, il y en avait aussi quelques uns de bien vivants qui déambulaient dans les salles avec leurs armes et leurs paquetages.
Je pensais toutefois que le musée consacrait une place de choix aux évènements de la bataille de la Marne et de l’ourcq qui sont au coeur du terroir … et ce n’est pas le cas. C’est vraiment dommage, car du coup le musée reste très généraliste, il aurait pu être placé n’importe où dans le quart nord est de la France. Le poilu Bury, le regretterait sans doute.
I y a en ce moment une expo temporaire qui retrace l’histoire de la génèse du monument américain à côté duquel le musée a été construit. C’est bien fait également, avec de nombreuses images de l’inauguration haute en couleurs en 1932. L’expo nous permet de voir ce monument sous en nouvel éclairage, alors que pendant des années nous passions à côté sans y prêter grand intérêt. Il a été restauré avec l’ouverture du musée.