Tables rondes romanaises – 4

Le titre de cette table ronde à laquelle nous assistâmes au Festival de Romans était "Apprendre à écrire pour internet".
Nous nous attendions à un cours de rédaction d’article.
Point de cela !  La discussion tourna autour du journalisme sur internet et ailleurs.
La place du journaliste dans l’environnement médiatique actuel. Le rôle du blogueur et des internautes dans ce monde noyé d’informations où les acteurs traditionnels doivent se remettre en question.

Photo illustratrice : la salle des Cordeliers lieu des manifestations du festival de Romans 

Y-a-t-il une écriture spécifique à internet ?

Intervenants :
– Anaïs Fontvielle : Journaliste pigiste sur le web. 
– André Bercoff, journaliste écrivain. Président du Press Club de France de 2004 à 2007
– Fée Mary-Dureau : Responsable communication et stages à l’EFDJ (Ecole Française de Journalisme)

Modératrice : Hélène Landron, responsable site elleadore.com

Pour André Bercoff, il n’y a pas de style d’écriture spécifique à internet.
On retrouve une grande variété de styles. Les internautes non journalistes ont aussi du talent.

L’école de journalisme de Fée Mary-Dureau forme à la presse écrite, ce qui est la base du journalisme.

Pour Anaïs Fontvielle qui écrit pour des sites d’information nationale sur internet, les articles doivent être percutants et plus courts que pour la presse écrite. Sur le web, les lecteurs sont de grands zappeurs. Pour les attirer et les conserver, il faut une communication directe et concise.
 
A noter qu’à district-crecy on observe l’inverse. Nos articles peuvent être beaucoup plus longs que ceux des journaux traditionnels, notamment les locaux qui baclent leur sujet en général, nous n’avons pas de limitation physique et nous n’adressons pas les amateurs de nouvelles vite lues comme pour la presse nationale.
 
La presse quotidienne nationale est en perte de vitesse. Elle n’apporte pas de plus-value en relayant les communiqué de presse. Au travers de tous les medias en temps réel, les lecteurs sont aussi vite informé que la presse.
Les éditoriaux d’opinion sont désormais dans les blogs dont c’est devenu une des vocations.
Le journaliste traditionnel est ainsi remis complètement en question du fait de cette "concurrence" qu’apportent les blogs.
Et cette contribution des blogueurs à la création journalistique, on la retrouve également au niveau de la source de l’information.

Pour André Bercoff, le vrai métier du journaliste, là où l’on attendrait de lui une véritable plus-value c’est dans le reportage.
C’est en allant sur le terrain, là où se passe l’actualité que le journaliste accomplit vraiment son métier.
Et ça marche ! mais au niveau de la presse magazine hebdomadaire ou mensuelle ou encore dans l’édition. On ne compte plus les livres qui sortent en rapport avec des faits d’actualité. Les journalistes gardent de côté leurs reportages et leurs interviews pour les publier sous forme de livres plutôt que de les livrer à la presse quotidienne. Il faut dire qu’en France celle-ci est en crise économique car peu lucrative. Sachant que 15% du budget d’un journal est vraiment consacré à la rédaction (le reste à l’impression et à la distribution), on mesure mieux le problème.

La vidéo : une interview vidéo n’a rien à voir avec une interview traditionnelle. C’est un vrai genre en soi. Les vidéos sur internet sont souvent ennuyeuses et longues. Certains sites de medias, parmi les plus grands en viennent à reproduire de manière textuelle le contenu de la vidéo. Les intervenants conviennent que les vidéos doivent courtes et percutantes et s’intégrer avec les autres modes de communication.

Les séances audio : en général elles ne sont que très peu écoutées, ce n’est pas un média qui marche.
Par contre la radio traditionnelle a toujours du succès. On va voir arriver bientôt la radio en images. Il n’est pas question de vidéo (sinon ce serait de la télé) mais de photos illustratrices diffusées en même temps que le son. Un véritable métier est à inventer, celui de mettre en scène les meilleures photos en rapport avec le texte.

De même, avec l’arrivée de nouveaux médias, de nouvelles formes d’écriture et de présentation vont naitre pour s’adapter à ces formats. Par exemple, il serait absurde de faire rentrer une page web classique sur un téléphone mobile. Il faut au contraire un format suffisamment concis et adapté à sa restitution sur un tel support forcément plus limité.

Des idées pour les créateurs de contenu journalistiques professionnels mais aussi amateurs !

La place des amateurs

D’ailleurs quelle est leur place à ces amateurs que nous sommes ?
Quand on a prouvé nos compétences et notre utilité dans le monde médiatique local, comment évoluer ?
A-t-on autre chose à démontrer ?
Des questions que se posent aussi de grands sites de qualité, par exemple l’un de mes préférés :
Auboisement correct, vers un média à 3 voix
L’article est intéressant, les commentaires encore plus. Ou comment on peut conjuguer les talents du journaliste, de l’expert et du citoyen sachant qu’aucun des 3 n’est un modèle à suivre dans la vie courante.
On s’emploie à attribuer de grandes qualités à des sites comme le nôtre ou comme auboisementcorrect parce qu’on est indépendant, qu’on est lié à aucun groupe de pression ni politique, ni idéologique, ni commercial ; parce qu’on ne cherche pas l’audience à tout prix, parce que personne nous impose nos sujets, parce qu’on a envie de parler culture autant que politique, parce qu’on recherche l’objectivité et le pluralisme des points de vue.
En fin de compte, faut-il être amateur pour être indépendant ?